Vieillir, ca rend beau.

Publié le par Vassili

Un peu incidemment, je me suis retrouvé à la projection de

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JOHN RAMBO
de et avec Sly

Le pitch: Rambo doit sauver des missionnaires prisonniers de la gente militaire Birmane.

Je vous l'accorde, le pitch est navrant. Du reste, je n'y suis allé que sur la foi du teaser, qui augurait d'une réouverture anticipée de la boucherie Sanzot, en me disant que ce serait aussi mauvais que le 2 ou le 3.

Et bien je suis encore sur le cul.

D'emblée, le ton est donné, avec des images de documentaires et de reportages qui rappellent à l'écrasante majorité de la planète le génocide monstrueux perpetué de nos jours, depuis 60 ans, en Birmanie. Autant le dire, ca calme.

Puis, on retrouve un Rambo qui, clairement, s'emmerde dans une vie de montreur de serpents en Thailande. Jusqu'à ce qu'un groupe de missionnaires lui demande de les conduire en Birmanie. On le devine, il va leur arriver bien des désagréments, et Rambo accompagné par des petits potes va aller les sortir de là.

Sur une histoire vue et revue, Stallone arrive à faire un portrait noir et cynique de son personnage, mais aussi de son pays, tout républicain qu'il est. Si les missionnaires croient au salut par la foi et la rédemption, Rambo ne croit et ne vit que par la violence, et pour elle. Rambo ne fait pas la guerre, il EST la guerre (ce qu'un flashback lourdingue souligne pour les spectateurs les plus obtus). Même au milieu des mercenaires, qui font la guerre pour le pognon, iui n'est mû que par le désir de violence et de mort. En cela, Rambo est tout sauf un héros. Et le discours bondieusard est balayé par une violence, par un instinct primal qui montre que l'homme est bien loin de s'élever par la prière, qu'il ne peut que prétendre se transcender, mais qu'il reste viscéralement un animal. C'est d'ailleurs assez frappant de voir que si Dieu aide les missionnaires à tenir, c'est leur humanité viscérale qui les aide à survivre.

Rambo est un film lucide, sur la condition de ces chiens de guerre que la vie a changés et marqués, et sur la relativité des grandes théories face aux monstruosités de l'existence. Car à travers cet exemple, Stallone fait réference à tous les pays du monde où la guerre fait loi. Et quand il dit "vivre pour rien ou mourir pour quelque chose", tout le monde rigole. C'est vrai, la phrase est risible. Mais même son personnage le sait. On sent dans son jeu et sa mise en scène que ce ne sont que de grandes tirades pour essayer de se prouver qu'il n'est pas un monstre. Perdu. Il n'existe et ne jouit que dans la mort, et ses cris lorsqu'il sème la mort sont autant des cris de rage que des cris de jouissance.

Autre point notable: si le cadrage n'est pas transcendant, le choix d'un grain de pellicule de documentaire et le travail monstrueux du chef op font qu'il n'y a aucun filtre entre la violence et le spectateur. On n'est pas dans de la violence hollywoodienne, même exacerbée comme dans le soldat Ryan, on a de la violence réelle, tellement monstrueuse qu'elle en devient palpable, et qu'à aucun moment on n'a le secours de se dire que ce n'est que du cinéma. Rien n'est épargné, y compris ces scènes qui stigmatisent de visu les horreurs les plus innomables. Stallone veut montrer, et il y parvient. Précision, d'ailleurs: l'interdiction -12 est une rigolade, la violence est monstrueuse, mais plus encore c'est la violence morale et le sadisme du film qui frappe et choque. Vous qui lisez mon blog, vous savez que je ne suis pas très impressionnable, et bien je vous garantis que certains passages ne m'ont pas mis à l'aise du tout. Ce n'est pas du beau combat chorégraphié, non, c'est la guerre, violente, sale, sournoise, dégueulasse, je crève ou tu crèves. On ne s'y trompe pas: on se raccroche à n'importe quelle occasion de plaisanter, y compris après le film, pour évacuer la tension et sauver les apparences.

Mais rien n'y fait: Rambo est un putain de film, qui vous poursuit longtemps. Les coups tuent, on n'est pas là pour faire du beau sentiment ou des grandes idées, on est là pour survivre. Stallone dresse un portrait dont les crétins diront qu'il sacralise la violence, mais c'est tout le contraire. Dans un précédent opus, il disait "pour faire la guerre, il faut devenir la guerre". La boucle est bouclée.

John Rambo est un film qui vous prend par les épaules et vous dit:"ca t'excite la guerre au cinoche? Tu trouves ca génial? Tu les admires, hein, les one man army? Viens voir, je vais te montrer comment c'est, la guerre."




PS: Rambo est vraiment le prototype de film à voir absolument sur grand écran. Aucune installation domestique ne saura restituer l'immersion indispensable d'une salle de cinoche.
PPS: j'en profite pour saluer l'un de mes anciens enseignants, que j'ai retrouvé à l'occasion de la projection et qui a paru aussi enthousiaste que moi.

Publié dans Mon univers

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